infographie lapisardi avocats – décret 28 décembre 2022

Décret n° 2022-1683 du 28 décembre 2022 portant diverses modifications du code de la commande publique

arrêté du 29 décembre 2022 modifiant les cahier des clauses administratives générales des marchés publics 

Nous l’attendions après les annonces du ministre de l’Economie il y a quelques semaines. Le décret du 28 décembre 2022 modifie le code de la commande publique avec 6 objectifs :

1.    Pérenniser pour les marchés publics de travaux < 100.000 € HT la dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence jusqu’au 31/12/2024 ;

2.    Augmenter le montant minimum de l’avance pour les PME dans les marchés de l’Etat (20 à 30 %) ;

3.    Clarifier le CCP sur la rémunération du maître d’œuvre, sur les modalités de remboursement de l’avance  ;

4.    Réduire le délai des ordres de service tardifs dans le CCAG travaux

4.    Préciser les conditions de transmission de la copie de sauvegarde

5.    Prévoir les modalités de mises en œuvre des marchés réservés pour les prestations réalisées dans des établissements pénitentiaires.

Ces modifications entrent en vigueur pour toutes les consultations lancées à compter du 1er janvier 2023.

 

I.              Marchés publics de travaux < 100.000 € HT : prolongation de la dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence jusqu’au 31 décembre 2024

Comme l’avait annoncé le ministre de l’Économie, la mesure temporaire issue de l’article 142 de la loi 2020-1525 du 7 décembre 2020 de simplification et d’accélération de l’action publique, valable jusqu’au 31 décembre 2022 est donc prolongée.

L’article 6 du décret prévoit ainsi cette dérogation, le cas particulier des petits lots et les rappels liés aux marchés conclus sans publicité ni mise en concurrence préalables :

« Jusqu’au 31 décembre 2024 inclus, les acheteurs peuvent conclure un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence préalables pour répondre à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes.

Ces dispositions sont également applicables aux lots qui portent sur des travaux dont le montant est inférieur à 100 000 euros hors taxes, à la condition que le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

Les acheteurs veillent à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin. »

II.             Les avances 

 

Pour les marchés de l’Etat le taux de l’avance minimal pour les PME passe de 20 à 30 % (article R2191-7 du CCP et R2391-4 pour les marchés de défense et de sécurité). Tous les CCAG sont modifiés en conséquence.

Les conditions de remboursement de l’avance sont clarifiées :

Le texte en vigueur

« Le remboursement de l’avance s’impute sur les sommes dues au titulaire, selon un rythme et des modalités fixées par les clauses du marché par précompte sur les sommes dues à titre d’acomptes, de règlement partiel définitif ou de solde.

Dans le silence du marché, ce remboursement s’impute :

1° Pour les avances inférieures ou égales à 30 % du montant toutes taxes comprises du marché, sur les sommes dues au titulaire quand le montant des prestations exécutées atteint 65 % du montant toutes taxes comprises du marché ;

2° Pour les avances supérieures à 30 % du montant toutes taxes comprises du marché, sur les sommes dues au titulaire dès la première demande de paiement » (R. 2191-11 du CCP)

Les modifications apportées par le décret

Le second alinéa de l’article R.2191-11 est remplacé par le texte suivant :

« Dans le silence du marché, le remboursement de l’avance est échelonné en tenant compte du montant de l’avance accordée et des sommes restant dues au titulaire. Ce remboursement s’impute par précompte sur les sommes dues au titulaire et débute :

1° Pour les avances inférieures ou égales à 30 % du montant toutes taxes comprises du marché, quand le montant des prestations exécutées atteint 65 % du montant toutes taxes comprises du marché ;

2° Pour les avances supérieures à 30 % du montant toutes taxes comprises du marché à la première demande de paiement.

Et l’article R.2193-21 qui concerne les avances en cas de sous-traitante est modifié de la même façon :

« Si le titulaire du marché qui a perçu l’avance sous-traite une part du marché en cours d’exécution, il rembourse l’avance correspondant au montant des prestations sous-traitées et donnant lieu à paiement direct à l’acheteur, même dans le cas où le sous-traitant ne souhaite pas bénéficier de l’avance.

Le remboursement par le titulaire s’impute sur les sommes qui lui sont dues par l’acheteur dès et débute à compter de la notification de l’acte spécial.

 

III.           Précision sur les conditions de dépôt des copies de sauvegarde (article R.2132-11 CCP)

 

 

IV.           Précision sur les conditions de dépôt des copies de sauvegarde (article R.2132-11 CCP)

Pour mémoire, le code prévoit que les candidats et soumissionnaires qui transmettent leurs documents par voie électronique peuvent également adresser à l’acheteur une copie de sauvegarde de ces documents, sur support papier ou sur support physique électronique (article R.2132-11 CCP).

Le décret précise que « cette copie ne peut être prise en considération que si elle est parvenue à l’acheteur dans le délai prescrit pour le dépôt, selon le cas, des candidatures ou des offres. ».

Quant au support de cette copie de sauvegarde, elle n’est plus précisée dans le code de la commande publique. La DAJ de Bercy indique que cette rédaction permet d’adresser une copie de sauvegarde par voie dématérialisée (par exemple sur une plateforme en ligne). Un arrêté viendra préciser les exigences techniques et de sécurité.

V.           La rémunération du maître d’œuvre en cas de dépassement du seuil de tolérance est clarifiée

Le décret clarifie les textes et limite les cas dans lesquels le maitre d’ouvrage peut, en cas de dépassement du seuil de tolérance :

(1) demander au maitre d’œuvre de reprendre ses études sans rémunération supplémentaire (coût prévisionnel des travaux) ;

(2) réduire sa rémunération (coût des travaux).

Cette modification ne change pas le droit positif : Il s’agit d’une clarification des textes conforme à la jurisprudence.

 

Le cas de l’adaptation des études en cas de dépassement du seuil de tolérance (coût prévisionnel des travaux)

Pour mémoire l’article R.2432-3 du CCP précise que

« Lorsque la mission confiée au maître d’œuvre comporte l’assistance au maître d’ouvrage pour la passation des marchés publics de travaux, le marché public de maîtrise d’œuvre prévoit l’engagement de son titulaire de respecter le coût prévisionnel des travaux arrêté au plus tard avant le lancement de la procédure de passation des marchés publics de travaux.

Le respect de cet engagement est contrôlé à l’issue de la consultation des opérateurs économiques chargés des travaux.

En cas de dépassement du seuil de tolérance, le maître d’ouvrage peut demander au maître d’œuvre d’adapter ses études, sans rémunération supplémentaire ».

Le décret modifie le dernier alinéa (partie surlignée) :

« En cas de dépassement du seuil de tolérance, ne résultant pas de circonstances que le maître d’œuvre ne pouvait prévoir, le maître d’ouvrage peut lui demander d’adapter ses études, sans rémunération supplémentaire ».

En clair,

Si le seuil de tolérance est dépassé, le maître d’ouvrage peut, en principe, demander au maître d’œuvre d’adapter ses études sans rémunération supplémentaire. Ce n’est toutefois pas le cas si le maître d’œuvre peut prouver que ce dépassement est lié à des circonstances qu’il ne pouvait pas prévoir.

 

La réduction de la rémunération du maître d’œuvre en cas de dépassement du seuil de tolérance (coût des travaux)

Le texte en vigueur

Pour mémoire l’article R.2432-4 du CCP précise que

« Lorsque la mission confiée au maître d’œuvre comporte, outre l’assistance au maître d’ouvrage pour la passation des marchés publics de travaux, la direction de l’exécution des marchés publics de travaux et l’assistance au maître d’ouvrage lors des opérations de réception, le marché public de maîtrise d’œuvre prévoit un engagement de son titulaire de respecter le coût, assorti d’un nouveau seuil de tolérance, qui résulte des marchés publics de travaux passés par le maître d’ouvrage.

Le respect de cet engagement est contrôlé après exécution complète des travaux nécessaires à la réalisation de l’ouvrage en tenant compte du coût total définitif des travaux résultant des décomptes finaux et factures des opérateurs économiques chargés des travaux.

Pour contrôler le respect de l’engagement du maître d’œuvre, le marché public de maîtrise d’œuvre prévoit les modalités de prise en compte des variations des conditions économiques.

En cas de dépassement excédant le seuil de tolérance fixé par le marché public de maîtrise d’œuvre, la rémunération du maître d’œuvre est réduite. Le marché public de maîtrise d’œuvre détermine les modalités de calcul de cette réduction qui ne peut excéder 15 % de la rémunération du maître d’œuvre correspondant aux éléments de missions postérieurs à l’attribution des marchés publics de travaux. »

La modification apportée par le décret du 28 décembre 2022

Le décret modifie le dernier alinéa (partie surlignée) :

En cas de dépassement du seuil de tolérance résultant d’un manquement du maître d’œuvre dans ses missions de direction de l’exécution des marchés publics de travaux et d’assistance au maître d’ouvrage lors des opérations de réception, la rémunération du maître d’œuvre est réduite. Le marché public de maîtrise d’œuvre détermine les modalités de calcul de cette réduction qui ne peut excéder 15 % de la rémunération du maître d’œuvre correspondant aux éléments de missions postérieurs à l’attribution des marchés publics de travaux.

En clair,

Si le seuil de tolérance est dépassé après l’exécution complète des travaux, le maître d’ouvrage ne peut réduire la rémunération du maitre d’œuvre que si ce dépassement résulte d’un manquement de ce dernier à ses missions de direction de l’exécution des marchés publics de travaux et d’assistance au maître d’ouvrage lors des opérations de réception.

Donc le maître d’ouvrage ne peut pas réduire la rémunération du maître d’œuvre si le dépassement du seuil de tolérance est lié à une circonstance qui n’est pas imputable à ce dernier, par exemple, à des circonstances imprévisibles.

VI.             Précision des conditions de réservation des marchés et des concessions pour les entreprises qui réalisent des prestations dans des établissements pénitentiaires (article 19 de la l’ordonnance n° 2022-1336 du 19 octobre 2022)

Le décret précise les conditions d’application des articles L. 2113-13-1 et L. 3113-2-1 du code de la commande publique qui prévoient un nouveau cas de réservation de marchés publics et de contrats de concession au bénéfice d’opérateurs économiques qui exécutent des prestations en établissement pénitentiaire.

Le décret fixe à 50 % la proportion minimale de personnes détenues qui doivent être employées dans le cadre de ce nouveau dispositif (R.2113-7 CCP).

mots clés : marchés publics – concession – marchés publics de travaux inférieurs à 100.000 € HT – rémunération du maitre d’œuvre – avances – marchés réservés – copie de sauvegarde

Ces achats publics innovants font leur entrée dans le code de la commande Publique et deviennent ainsi pérennes

Le décret du 13 décembre 2021  crée un nouvel article : R.2122-9-1 du CCP et met un terme à l’expérimentation prévue par le décret du 24 décembre 2018.

Pour mémoire, voici le mécanisme des achats innovants :

Il est possible de passer un marché public sans publicité ni mise en concurrence préalables pour des achats innovants (travaux, fournitures ou services innovants) et pour un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 €HT.

💡 Qu’entend-on par achats innovants ?

La réponse est donnée à l’article L.2172-3 du CCP sur le partenariat d’innovation : il s’agit de travaux, fournitures ou services nouveaux ou sensiblement améliorés. Le caractère innovant peut consister dans la mise en œuvre :
-de nouveaux procédés de production ou de construction,
-d’une nouvelle méthode de commercialisation
-ou d’une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques, l’organisation du lieu de travail ou les relations extérieures de l’entreprise.

🧩L’achat innovant intègre également le mécanisme des petits lots.

 

Quand le besoin est supérieur à 100.000 €HT et qu’il est scindé en lots dont certains correspondent à des achats innovants, l’acheteur peut passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables pour ces petits lots, si 2 conditions sont réunies :

– Le montant de chaque lot lié à l’achat innovant est inférieur à 80.000 €HT pour les fournitures ou services innovants ou 100.000 €HT pour les travaux innovants ;

– Et le montant du lot ou le montant cumulé de ces petits lots ne dépasse pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

Le nouvel article R.2122-9-1 du CCP rappelle ensuite que « Lorsqu’il fait usage de cette faculté, l’acheteur veille à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin. »

L’obligation de déclaration auprès de l’Observatoire économique de la commande publique, autrefois prévue par le décret du 24 décembre 2018, n’est pas reprise dans le CCP.

🧭 Décret n° 2021-1634 du 13 décembre 2021 relatif aux achats innovants et portant diverses autres dispositions en matière de commande publique, publié aujourd’hui au JO.

⏰ cette modification du CCP entre en vigueur demain le 16/12/21.

 

 

 

marchés publics innovants

Consultez l’article en cliquant sur ce lien.

Notre article dans Dalloz Actualité du 14 septembre 2021

 

La loi n° 2016-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République[1] a un objectif ambitieux : apporter des réponses au repli communautaire et au développement de l’islamisme radical. Et pour le législateur, la garantie du respect des principes de la république et des exigences minimales de la vie en société (Intitulé du Titre Ier de la loi) passe en premier lieu par les services publics et donc corrélativement par les contrats de la commande publique qui ont pour objet l’exécution d’un service public.

Même si les praticiens attendent une circulaire destinée à préciser ces mesures[2], nous pouvons d’ores et déjà percevoir les limites de cette loi et les problèmes d’interprétation qui pourront se poser.

 

Un périmètre d’application qui aurait pu être plus large et pourra donner lieu à interprétation

La loi[3] impose à tous les organismes de droit public ou de droit privé chargés directement de l’exécution d’un service public d’assurer l’égalité des usagers devant le service public et de veiller au respect des principes de laïcité et de neutralité du service public. Sont donc par exemple concernés les organismes de sécurité sociale (URSSAF, CPAM…) tous comme les sociétés HLM visées expressément par la loi.

Ces organismes doivent veiller à ce que non seulement leurs salariés respectent ces règles, mais également « toute autre personne à laquelle il confie, en tout ou partie, l’exécution du service public »[4], autrement dit les titulaires de leurs contrats de la commande publique.

Au premier abord le périmètre paraît large et clair car il n’est pas fait de distinction entre services publics administratifs (SPA) et services publics industriels et commerciaux (SPIC). Et comme le service public vise un large domaine, cette loi pourra concerner des situations telles que la gestion d’une crèche, l’exploitation d’un casino, d’une piscine aqualudique etc. Mais les praticiens vont être confrontés à des questions d’interprétation. En effet, le législateur n’a pas utilisé le terme « gestion » (gestion d’un service public) mais « exécution ». Il n’a pas non plus visé les concessions de service, les délégations de service public et les marchés de services. Aussi, on peut légitimement se poser la question de savoir si la loi s’applique à des contrats de fournitures ou de travaux. Par exemple, si un acheteur public est chargé, dans le cadre de l’exécution d’une mission de service public, de réaliser des travaux, est-ce que les contrats conclus pour ces travaux entrent dans le périmètre de la loi ?

Par ailleurs, la loi aurait pu aller plus loin en visant d’autres contrats, pas seulement les contrats de la commande publique. Sont en effet exclus de ce périmètre des contrats telles que les conventions d’occupation du domaine public, qui permettent par exemple à des sociétés d’exploiter une activité commerciale dans un aéroport. Sont également exclus les baux emphytéotiques administratifs (BEA) qui peuvent par exemple permettre à une société d’occuper un stade pour y organiser des activités et manifestations sportives.

Enfin, le gouvernement aurait pu envisager de modifier les cahiers des clauses administratives générales (2021) publiés dernièrement pour ajouter directement ces clauses. Cette initiative aurait facilité et accéléré l’application de la loi pour les marchés publics.

De nouvelles obligations pour les titulaires de contrats de la commande publique

Le titulaire doit assurer l’égalité des usagers devant le service public et les principes de laïcité et de neutralité du service public.

Pour cela, la loi prévoit que le titulaire doit s’assurer que ses salariés et les personnes sur lesquelles il exerce une autorité hiérarchique ou un pouvoir de direction qui participent à l’exécution du service public respectent ces principes. Ces derniers doivent s’abstenir « notamment de manifester leurs opinions politiques ou religieuses ». Ils doivent également traiter de façon égale les personnes et respecter leur liberté de conscience et leur dignité. Il s’agit pour l’essentiel d’une reprise de la jurisprudence qui considère déjà que les principes de neutralité et de laïcité s’appliquent aux salariés des personnes morales de droit privé gérant un service public (Cass. soc., 19 mars 2013, n° 12-11.690, Bull. 2013, V, n° 76).

Et le législateur ne s’arrête pas là : les titulaires des contrats visés par la loi devront également veiller à ce que leurs sous-traitants ou sous-concessionnaires respectent également ces obligations.

 

De nouvelles clauses dans les futurs contrats et certains contrats en cours et des sanctions liées

Pour que ces obligations ne restent pas lettre morte, la loi prévoit deux obligations :

Les clauses du contrat de la commande publique devront rappeler ces obligations et préciser les modalités de contrôle du cocontractant. Pour réaliser ces contrôles, l’acheteur ou l’autorité concédante pourra demander la communication de notes internes mais aussi prévoir des contrôles inopinés dans les locaux.

De plus, le titulaire devra communiquer à son cocontractant les contrats de sous-traitance ou de sous-concession qui portent sur l’exécution de la mission de service public. Cette communication permettra à l’acheteur ou à l’autorité concédante de vérifier que les règles de neutralité et de laïcité sont prévues et contrôlées par son titulaire lui-même.

Et naturellement, la loi prévoit que les contrats de la commande publique devront prévoir des sanctions si son cocontractant « n’a pas pris les mesures adaptées pour les mettre en œuvre et faire cesser les manquements constatés »[5]. Il pourra s’agir d’une pénalité dans un premier temps avec le cas échéant, une résiliation pour faute si la violation de ces principes persiste.

L’application dans le temps est la suivante :

  • Ces clauses doivent être intégrées dans tous les contrats concernés pour lesquels une consultation ou un avis de publicité est envoyé depuis le 25 août dernier.
  • Pour les contrats en cours ou pour lesquels une consultation a été lancée avant le 25 août dernier, il faut distinguer 2 situations :
    • Pour les contrats qui se terminent avant le 25 février 2023, ces clauses n’ont pas à être insérées ;
    • Pour les contrats qui se terminent après le 25 février 2023, les acheteurs et autorités concédantes ont un an, jusqu’au 25 août 2022 pour intégrer ces clauses dans les contrats en cours.

Les principes sont posés et la rédaction de ces clauses ne devrait pas poser de difficultés. Reste la mise en place pratique qui se révèle toujours délicate quand il s’agit de questions de neutralité et de laïcité.

 

Sophie Lapisardi, avocat associé, spécialiste en droit public, LAPISARDI AVOCATS

 

[1] Publiée au JO du 25 août 2021

[2] Note de la DAJ du 25/08/21 : https://www.economie.gouv.fr/daj/loi-du-24-aout-2021-confortant-le-respect-des-principes-de-la-republique-quelles-consequences

[3] article 1er point I

[4] Article I.1

[5] Article 1er II

Article publié dans Dalloz Actualité le 8 septembre 2021 

 

Le décret n° 2021-1111 du 23 août 2021[1] tire les conséquences de la décision de la CJUE du 17 juin 2021 Simonsel & Well A/S aff C 23/20 sur les accords-cadres et modifie certaines règles concernant les marchés de défense ou de sécurité.

Les accords-cadres devront toujours comporter un maximum en montant ou en quantité

La modification du code de la commande publique ne s’est pas fait attendre.

En juin dernier, la Cour Européenne a en effet considéré que l’acheteur public était tenu de prévoir un montant ou une quantité maximum et qu’une fois cette limite atteinte, l’accord-cadre aura épuisé ses effets.

Le décret modifie donc les articles R.2121-8 et R .2162-4 du Code de la commande publique. L’acheteur public doit fixer un maximum en valeur ou en quantité pour tous les accords-cadres (à bons de commande ou à marchés subséquents). En revanche, il est toujours possible de conclure des accords-cadres sans minimum.

 

Mais l’entrée en vigueur, repoussée au 1er janvier 2022, laisse perplexe

En effet, cette règle s’appliquera aux accords-cadres pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 1er janvier 2022.

Ce report est d’autant moins compréhensible que dans ses commentaires sur cet arrêt, la DAJ du Ministère de l’économie recommandait aux acheteurs d’appliquer d’ores et déjà cette règle[2].

Le juge n’a d’ailleurs pas attendu pour annuler des procédures de passation pour ce motif. Nous recensons à ce jour deux décisions par lesquelles le juge du référé précontractuel annule la procédure de passation en raison de l’absence de valeur ou de quantité maximum [3]. Le juge des référés s’appuie sur l’arrêt de la CJUE et fait fi de l’entrée en vigueur repoussée du décret du 23 août 2021. Selon lui, cette jurisprudence est immédiatement applicable car la CJUE n’a pas limité dans le temps la portée de sa décision.

Dans ces deux décisions, le juge a également considéré que le requérant était lésé par ce manquements aux règles de publicité et de mise en concurrence.

 

Pourtant, l’existence d’une lésion n’allait pas de soi. Dans son arrêt de juin dernier la CJUE avait considéré que ce manquement était « suffisamment perceptible pour pouvoir être décelé par un opérateur économique qui entendait soumissionner et qui devait, de ce fait, être considéré comme étant averti ».  Mais le juges des référé s’appuie sur les raisons données par la CJUE : ce maximum revêt « une importance considérable pour un soumissionnaire »[4] car c’est sur cette base que ce dernier sera en mesure d’apprécier sa capacité à exécuter les obligations découlant de cet accord-cadre. Le juge des référés national en conclut que faute d’information sur ce maximum le requérant n’a pas pu une présenter une offre adaptée. Et l’argument selon lequel le requérant était l’attributaire sortant et disposait ainsi de suffisamment d’informations, est systématiquement rejeté.

Il faut donc que les acheteurs publics appliquent cette règle dès à présent.

Une mise en pratique qui pose des difficultés car il s’agit d’un changement culturel pour les acheteurs publics

Pour bon nombre de consultations, cette obligation va poser des difficultés. Prévoir une estimation du montant ou des quantités fait déjà souvent l’objet d’âpres discussions en interne entre acheteurs publics et prescripteurs. On peut donc imaginer que fixer une valeur ou une quantité maximale sera parfois une gageure. Car cette règle remet en cause une partie de la souplesse des accords-cadres. Il n’est désormais plus possible de prévoir des achats illimités avec un ou des prestataires pendant une période déterminée. Le maximum est un couperet ; une fois atteint le marché cesse.

Certains seraient alors tentés de « gonfler » ce maximum pour s’assurer une marge de manœuvre durant l’exécution du marché et ainsi faire face à une hausse des besoins. C’est d’ailleurs ce que recommandait la DAJ de Bercy dans sa note sur l’arrêt de la CJUE[5].

Mais c’est une fausse bonne idée.  La CJUE justifie l’obligation de fixer un maximum par le respect des grands principes de la commande publique. En effet, cette information a pour objectif de permettre aux candidats de comprendre la portée des obligations contractuelles mises à leur charge et corrélativement, à l’acheteur public de vérifier que les offres correspondent à ses exigences. Autrement dit, le maximum permet d’apprécier la capacité de l’entreprise à exécuter les obligations découlant du marché. Aussi, en « gonflant » le maximum, les acheteurs publics risquent de dissuader les plus petites entreprises de se présenter ou même d’écarter ou de désavantager ces mêmes entreprises lors de l’analyse des candidatures ou des offres.

Autre effet néfaste de la surestimation du maximum : elle va fausser un certain nombre d’informations et notamment les chiffres de l’observatoire économique de la commande publique (OECP).

 

La passation des marchés de défense ou de sécurité (MDS) est allégée et simplifiée

Les MDS sont des marchés conclus par l’Etat et ses établissements publics qui ont l’un des objets listés à l’article L1113-1 du code de la commande publique. Il s’agit par exemple de la fourniture d’équipements qui sont destinés à être utilisés comme des armes à des fins militaires. Comme ces MDS sont soumis à un régime dérogatoire pour leur passation et leur exécution, le juge veille à leur périmètre. Ainsi, le marché de fournitures de pistolets semi-automatiques lancé par le Ministère de la transition écologique et solidaire pour ses agents de contrôle et de surveillance n’est pas un MDS[6].

Et le décret du 23 août 2021 rend le régime de ces marchés un peu plus dérogatoire aux règles des autres marchés.

En effet, le seuil de publicité et de mise en concurrence passe de 40.000 euros HT à 100.000 euros HT.

L’acheteur pourra également passer un marché sans publicité ni mise en concurrence pour les lots inférieurs à 80.000 €HT si le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur estimée totale des lots[7].

Le décret prévoit également un nouveau cas de marché sans publicité ni mise en concurrence : il s’agit des marchés de fournitures ou de services scientifiques ou techniques. Deux conditions doivent être remplies :

  • Le montant estimé du marché doit être inférieur au seuil de procédure formalisée,
  • et il doit être nécessaire à l’exécution de tâches scientifiques ou techniques sans objectif de rentabilité et spécialisé dans le domaine de la recherche du développement, de l’étude ou de l’expérimentation. Il ne peut pas s’agir de prestations de fonctionnement courant du service[8].

 

Les règles concernant la computation des achats payés par carte achat sont assouplies : le code autorise désormais une vérification a posteriori et par trimestre de la valeur des marchés payés par carte achat[9].

Les règles de publicité pour les procédures adaptées sont également allégées. Désormais, la publication au Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) n’est plus obligatoire. L’acheteur public choisira librement les modalités de publicités adaptées en fonction des caractéristiques du marché[10].

Dans le but de favoriser l’accès des petites et moyennes entreprises aux MDS, le décret supprime l’obligation de constituer des garanties financières en contrepartie du versement de certaines sommes. Il prévoit également plusieurs mesures d’ordre financier pour le règlement partiel définitif[11].

Ce décret clarifie également la rédaction de certaines règles, notamment celles concernant la fixation des prix définitifs[12].

A l’exception des règles relatives aux maximums pour les accords-cadres (voir ci-dessus), les règles sur ces marchés de défense ou de sécurité s’appliquent aux marchés pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 26 août 2021.

Sophie Lapisardi, avocat associé, spécialiste en droit public

 

 

[1] modifiant les dispositions du code de la commande publique relatives aux accords cadres et aux marchés publics de défense ou de sécurité

[2] https://www.economie.gouv.fr/daj/consequences-sur-les-accords-cadres-de-larret-de-la-cjue-simonsen-weel

[3] TA bordeaux, ord, 23 août 2021, Sté Coved n° 2103959 et TA Lille, ord, 27 août 2021 SELARL Centaure Avocats, n° 2106335

[4] CJUE du 17 juin 2021 Simonsel & Well A/S aff C 23/20

[5] https://www.economie.gouv.fr/daj/consequences-sur-les-accords-cadres-de-larret-de-la-cjue-simonsen-weel

[6] Conseil d’Etat 18 décembre 2019, Min. de la Transition écologique et solidaire c/ Sté Sunrock n0 431696

[7] Article 2322-14 modifié (article 6 du décret)

[8] Nouvel article R 2322-15 (article 7 du décret)

[9] Nouvel article R.2321-7 créé par l’article 5

[10] Article R.2331-5 modifié (article 9 du décret)

[11] Nouveaux articles R.2391-20-1 et R.2391-20-2 (article 22 du décret)

[12] Article 3

 

 

Loi Asap et commande public

 

 

BTP marchés publics, surcoûts

Le BTP, fortement touché par la crise sanitaire, attendait de pied ferme les annonces du gouvernement mercredi 10 juin, à l’occasion de la présentation de la loi de finances rectificative (3ème) pour 2020 (déclaration de Bruno Le Maire lors du compte rendu du conseil des ministres du 10 juin 2020).

Les regards étaient notamment portés vers les mesures concernant les surcoûts liés à la mise en place des règles sanitaires, estimés à 25/30 % selon les professionnels du secteur.

Les annonces concernant ces surcoûts peuvent être classées en 3 catégories (marchés publics de l’Etat, autres marchés et mesures générales).

Elles donnent le ton et la mesure mais la partition est loin d’être écrite !

 

I. Pour les marchés publics de l’Etat et de ses opérateurs

 

Dans une instruction du 9 juin 2020, le premier ministre a présenté aux Ministres et Secrétaires d’Etat une série de préconisations pour la prise en charge des surcoûts, sous la forme d’une « méthode » à mettre en place pour marchés de l’Etat et de ses opérateurs (SNCF, RATP, société du grand Paris).

Dans quels cas appliquer cette méthode ?

Les entreprises ont supporté des coûts durant la période d’interruption du chantier, qu’elles en soient ou non à l’origine.

1er élément marquant : l’instruction ne fait aucune distinction selon la personne à l’origine de l’arrêt. Que l’arrêt des travaux soit lié à un ajournement ou une décision de l’entreprise, la solution est la même pour les surcoûts.

2ème élément marquant : il faudra adapter la méthode au cas par cas, en fonction des caractéristiques de chaque marché, notamment sa durée d’exécution.

 

En revanche, il est prévu que la méthode décrite dans cette instruction ne s’applique pas dans 2 hypothèses :

  • Cette méthode ne s’applique pas si la question des surcoûts est déjà traitée par le contrat (peu importe d’ailleurs de quelle manière c’est-à-dire avec ou sans prise en charge par le maître d’ouvrage). Autrement dit si le contrat précise les conditions de prise en charge ou de non prise en charge des surcoûts, ce sont les règles du contrat qui s’appliqueront.

On pense donc notamment à l’article 18-3 du CCAG Travaux.

  • Cette méthode ne s’applique pas si un accord a déjà été trouvé. Dans ce cas, cet accord reste valable et ne doit pas être remis en cause.

 

Quels sont les surcoûts pris en charge ?

L’instruction distingue les surcoûts liés à la période d’interruption et ceux liés aux nouvelles modalités d’exécution des travaux.

  • Les surcoûts liés à l’interruption des travaux

L’instruction précise les surcoûts pris en charge, tout en apportant immédiatement des limites et en précisant ceux qui restent à la charge des entreprises.

BTP covid marchés publics surcoûts

 

Quelle est la clé de répartition des surcoûts pris en charge ?

L’instruction évoque une prise en charge en « tout ou partie » et ne fournit donc aucune clé de répartition.

Quelle procédure mettre en place ?

L’instruction insiste à plusieurs reprises sur la nécessité d’un dialogue et d’une négociation entre les parties. Elle décrit la procédure suivante :

  1. Le maitre d’ouvrage doit, si ce n’est pas déjà fait, faire chiffrer les coûts directs par son cocontractant.
  2. Il doit ensuite mettre en place un « dispositif formalisé » de concertation et favoriser une solution amiable, le cas échéant avec l’aide de la médiation des entreprises ou du comité national ou des comités consultatifs interrégionaux de règlement amiable des différends ou litiges.
  3. Les parties matérialiseront ensuite un accord (avenant et/ou protocole transactionnel)
  4. Et le maître d’ouvrage paiera rapidement cette dépense supplémentaire.

 

 

  • Les surcoûts liés aux nouvelles modalités d’exécution du chantier

 

L’instruction distingue les coûts directs des coûts indirects.

 

marchés publics covid surcoûts BTP

Quelle procédure mettre en place ?

L’instruction insiste à plusieurs reprises sur la nécessité d’un dialogue et d’une négociation entre les parties. Elle décrit la procédure suivante :

  • Les surcoûts doivent être tracés et réduits. L’instruction ne le précise pas expressément mais nous comprenons qu’elle favorise le contradictoire pour ce traçage. Elle évoque d’ailleurs un « travail collectif et collaboratif mené par l’ensemble des parties prenantes »

 

  • Le maître d’ouvrage doit ensuite mettre en place un « dispositif formalisé » de concertation et favoriser une solution amiable, le cas échéant avec l’aide de la médiation des entreprises ou du comité national ou des comités consultatifs interrégionaux de règlement amiable des différends ou litiges.

 

  • Les parties matérialiseront ensuite un accord (avenant et/ou protocole transactionnel).

 

II. Pour les autres marchés publics

 

Les annonces sont très restreintes.

Le gouvernement indique avoir demandé aux Préfets de promouvoir des « chartes définissant une approche solidaire des surcoûts entre les entreprises du BTP, les maîtres d’ouvrage, dont les collectivités et bailleurs, et les maîtres d’œuvre ».

L’Etat pourrait financer une partie des surcoûts des collectivités par le biais des dotations (dotation de soutien à l’investissement local DSIL et dotation d’équipement des territoires ruraux DETR).

 

III. Les annonces générales

 

Un comité de suivi est créé pour « objectiver les surcoûts liés aux pertes de rendement sur les chantiers compte tenu de l’application des règles de sécurité sanitaire ».

Ce comité sera piloté par le commissariat général au développement durable (CGDD), en lien avec les fédérations professionnelles. Il a pour objet de donner des références pour la négociation entre maîtres d’ouvrage et entreprises du BTP.

IV. Que doit-on en penser ?

 

Les acteurs qui espéraient trouver une solution au problème des surcoûts liés à la crise du Covid sont clairement déçus, surtout les entreprises.

En effet ces mesures n’ont pas de caractère impératif, ne prévoient pas de clé de répartition et certains surcoûts sont d’ores et déjà identifiés comme ne pouvant pas être indemnisés.

Le contrat sera d’ailleurs souvent plus protecteur pour les entreprises.

Ces annonces mettent cependant en évidence 2 éléments saillants :

  • La nécessaire collaboration entre les parties au contrat pour trouver une solution à plus ou moins long terme et la mise en place d’un dispositif de concertation et de négociation ;
  • La nécessité pour les entreprises de « tracer » les surcoûts indirects liés à la reprise d’activité tout au long du chantier.

Nous l’avions déjà souligné dans un article antérieur, plus que jamais, les entreprises doivent se constituer un solide dossier de réclamation pour obtenir gain de cause.

 

Photo by Omid Armin on Unsplash

 

Infographie

Les mesures exceptionnelles prises en raison du COVID-19 ont de multiples conséquences sur les procédures de passation en cours. Cette situation inédite nécessite de prendre des mesures particulières du côté de l’acheteur :

 

  • Il est possible de reporter les délais de remise des candidatures et des offres

Le délai de remise des candidatures et des offres est la date et l’heure maximale imparties aux candidats pour déposer leurs candidatures et leurs offres. A défaut de respecter ce délai, l’offre ou la candidature est irrecevable.

Les acheteurs doivent le fixer en tenant compte (R.2143-1, R.2143-2, R.2151-1 et R.2151-3 du Code de la commande publique) :

  • De la complexité du marché ;
  • du temps nécessaire aux opérateurs économiques pour répondre ;
  • Ainsi que de l’existence d’une visite des sites ou de la consultation de documents sur place.

Le code prévoit deux cas dans lesquels le délai de remise des offres doit obligatoirement être prolongé (R.2151-4 du CCP) :

  • Lorsque les documents de la consultation sont modifiés de façon importante ;
  • Ou lorsqu’un complément d’informations, nécessaire à l’élaboration de l’offre, demandé en temps utile par l’opérateur économique, n’est pas fourni dans les délais par l’acheteur.

Ces hypothèses ne concernent pas directement l’hypothèse actuelle.

 

Toutefois, l’acheteur peut toujours prolonger les délais de remise des candidatures et des offres pour d’autres raisons. Par exemple, une prolongation 20 minutes a été admise en raison de problèmes techniques sur la plateforme de dématérialisation (CAA de NANTES, 22/12/2017, 16NT01413).

Aussi, dans la situation actuelle, l’acheteur n’est pas tenu de prolonger les délais mais il peut le faire.

En effet, les mesures exceptionnelles prises en raison du COVID-19 peuvent justifier que les acheteurs prolongent les délais de remise des candidatures et des offres car les entreprises n’ont pas nécessairement eu le temps ou ne peuvent pas matériellement répondre dans les délais impartis (désorganisation des services, manque de personnel, remise d’échantillons impossible etc).

Il faut néanmoins respecter certaines conditions :

  • Publier un avis rectificatif et informer tous les opérateurs économiques qui ont téléchargé les documents de la consultation du nouveau délai ;
  • Modifier les documents de la consultation et notamment le règlement de la consultation pour indiquer ce nouveau délai ;
  • Modifier tous les délais contractuels susceptibles d’être impactés par ce report (date de début d’exécution des prestations, date de fin du marché public, les éventuels phasages de travaux etc).

 

Et que faire si les opérateurs économiques ont déjà déposé une offre avant le report de délai ?

Dans ce cas, les opérateurs économiques pourront bénéficier du report du délai pour améliorer leur offre et en déposer une nouvelle. Seule la dernière offre déposée sera examinée par l’acheteur (article R2151-6 du CCP).

 

  • Il est possible de reporter le délai de validité des offres

Les documents de la consultation fixent un délai de validité des offres. Il s’agit de la date limite jusqu’à laquelle une entreprise est liée par son offre.

Il est possible que le délai de validité des offres expire pendant le confinement ou peu de temps après ce qui ne laissera pas le temps aux acheteurs de les étudier et de se prononcer.

Aussi, pour éviter de devoir relancer une procédure de passation, il est possible, dès à présent, de demander aux opérateurs économiques de prolonger le délai de validité de leurs offres. Toutefois pour en bénéficier, plusieurs conditions doivent être remplies afin de respecter le principe d’égalité de traitement :

Si un candidat ne donne pas son accord :

  • il ne peut pas être exclu sauf si les documents de la consultation le prévoyaient expressément (CJUE, 6ème chambre, ordonnance, 13 juillet 2017 affaire C‑35/17).
  • L’acheteur devra donc attribuer le marché avant la fin du délai de validité des offres ;
  • Et, si cela n’est pas possible, il devra déclarer sans suite la procédure.
  • comme nous ne connaissons pas la date de la fin du confinement, les acheteurs pourront indiquer que le délai est prolongé à X jours à compter de la fin de la période de confinement.

Les acheteurs doivent également faire preuve de bon sens. La durée de prolongation de la validité des offres ne doit pas être excessive pour éviter par exemple des modifications importantes dans la situation des entreprises ou que l’offre ne soit plus économiquement viable pour l’entreprise.

 

  • Il faut aménager les conditions de visite des sites et de consultation de documents sur place

Certains marchés prévoient des visites obligatoires de site ou des consultations de documents sous peine ou non d’irrégularité de l’offre. C’est le cas notamment des marchés de nettoyage où il est essentiel que les candidats connaissent le nombre et les caractéristiques des vitres, le type de sols etc…

Des visites sur site ont pu être programmées de manière groupée ou individuellement pendant la période de confinement. Elles ne peuvent donc matériellement pas être réalisées. L’acheteur doit alors agir :

  • Si une visite groupée est prévue, l’acheteur devra alors modifier les documents de la consultation pour fixer une autre date.
  • Si des visites individuelles ont été programmées, l’acheteur devra décaler ces dates avec les opérateurs économiques.
  • Les acheteurs devront également modifier la date limite de remise des offres pour tenir compte du report des visites obligatoires sur site. Ils doivent veiller à laisser un délai suffisant entre les nouvelles dates de visites et le nouveau délai de remise des offres pour que les opérateurs économiques puissent préparer leur offre.

 

  • Il sera possible de poursuivre la négociation ou le dialogue sous certaines conditions

Les mesures prises en raison du Covid-19 posent également des questions sur la tenue des négociations ou des dialogues qui sont en cours ou programmés.

Dans la mesure du possible, il faut privilégier les moyens de communication à distance :

  • Le téléphone ou les visioconférence (utile si des éléments doivent être montrés). Dans ce cas, il faut retracer tous les échanges afin de respecter les principes de transparence et d’égalité de traitement des candidats.
  • Le mail. Dans ce cas, il faut absolument échanger avec les opérateurs économiques via la plateforme de dématérialisation.

Et si la tenue des négociations est impossible dans ces conditions, il est préférable de demander aux candidats d’accepter un report de validité de leurs offres (cf. point II ci-dessus) ou de déclarer sans suite la procédure.

 

  • L’acheteur peut également déclarer sans suite la procédure

Les différentes mesures précitées ne pourront pas toujours être mises en place. Par exemple, par manque de personnel au sein des services achats ou en raison de délais trop courts.

Dans ce cas, il est préférable pour l’acheteur de déclarer sans suite la procédure :

  • Elle peut se faire à tout moment de la procédure (2185-1 du CCP).
  • Et l’acheteur devra impérativement communiquer aux opérateurs économiques qui ont participé à la procédure les motifs de cette décision. Ici il faudra expliquer qu’il est impossible d’assurer la poursuite de la procédure de passation en raison des mesures prises pour lutter contre le COVID-19 (2185-2 du CCP).

Une nouvelle procédure devra alors être lancée à la fin des mesures de confinement imposées par l’Etat. Et, en cas d’urgence, un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables pourra être conclu.

 

 

 

commande publique

Les praticiens du droit de la commande publique ont et auront bien besoin de ce kit en ce moment et dans les semaines et les mois qui viennent !

Les questions se multiplient sur la passation et l’exécution des contrats de la commande publique.

Et face au caractère inédit de la situation, revenir aux fondamentaux est essentiel.

De plus, le cabinet est mobilisé pour vous apporter des réponses (voir nos précédents articles sur le site du cabinet).

Enfin une avancée notable : le projet de Loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 prévoit que le gouvernement est autorisé à prendre par Ordonnance toute mesure «adaptant les règles de délai, d’exécution et de résiliation prévues par les contrats publics et le code de la commande publique, notamment celles relatives aux pénalités contractuelles ». Le texte précise que cette mesure devra être conforme au droit de l’Union Européenne.

Nous devrions donc avoir de nouvelles pistes dans quelque temps. Mais, nul doute que le kit de survie de la commande publique restera, en tout état de cause, d’actualité !

 

Sophie Lapisardi, avocat associé, spécialiste en droit public

slide 1

Cette situation inédite va poser de nombreuses questions et problèmes pour la passation et l’exécution des contrats publics.

Même si la situation est exceptionnelle, tout n’est pas et ne sera pas possible !

 

J’ai coutume de dire qu’il existe 4 principes de la commande publique :

  • les 3 inscrits dans les textes : égalité de traitement, liberté d’accès et transparence des procédures ;
  • et un 4ème  : le bon sens. Il sera plus que jamais indispensable !

 

Nous avons publié deux fiches/articles sur ce thème :

fiche 1 : que faire si l’entreprise ne peut plus/pas exécuter son marché 

fiche 2 : Quelle procédure doit suivre l’entreprise si elle ne peut plus/pas exécuter son contrat ?

 

Le Cabinet a mis en place une organisation pour vous aider et vous accompagner.

Nous pouvons consulter tous nos dossiers distance, accéder à toutes les bases de données et nous disposons d’un outil de visio-conférence performant.

Pour nous contacter, privilégiez le mail :

contact@lapisardi-avocats.fr

 

Et – le plus important – prenez bien soin de vous et de vos proches !

 

Sophie Lapisardi