Ce livre est destiné à tous les professionnels qui veulent innover dans leur pratique du droit.

Le Legal Design a été pour chacun de nous une révélation et même une forme de délivrance : le droit peut être clair, impactant, engageant. Et nos interlocuteurs peuvent même avoir envie de nous lire !

Depuis plusieurs années, nous avons à cœur d’aider les professionnels du droit à mieux valoriser leur expertise et leur singularité. Nous sommes convaincus que le Legal Design, encore mal compris aujourd’hui, sera la norme demain.

Aussi, nous souhaitons, avec ce livre, diffuser nos astuces au plus grand nombre.

Ce livre est le mariage entre un manifeste, qui met en évidence des règles essentielles et un livre de cuisine qui ouvre l’appétit.

Nous vous invitons donc à découvrir ces 52 règles avec gourmandise ! Nous espérons que cette lecture vous incitera à révéler les vôtres, avec vos équipes ; qu’elle vous ouvrira de nouvelles perspectives, qu’elle fera émerger des idées d’outils et de services pour améliorer, voire réenchanter votre pratique du droit.

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« La forme, c’est le fond qui remonte à la surface ».

 

Cette citation de Victor Hugo convient parfaitement aux mémoires en réclamation en matière de marchés publics ou de concessions. En effet, bon nombre de réclamations sont rejetées par les cocontractants publics, notamment les maîtres d’ouvrage, parce que mal présentées.  Pourtant quelques règles issues du Legal Design permettent d’optimiser l’efficacité de ses réclamations c’est-à-dire d’atteindre l’objectif de l’entreprise : négocier une juste rémunération complémentaire ou une indemnisation.

 

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A l’heure où les réclamations se multiplient en raison du contexte économique, voici quelques règles pour les rendre plus efficaces, règles tirées notamment du design, de la rédaction en langage clair et de la visualisation.

Bien entendu, la règle élémentaire est de rédiger des mémoires en réclamations recevables c’est-à-dire qui respectent le formalisme des CCAG et le cas échéant, du contrat. Mais une fois ces règles respectées, comment rendre sa réclamation plus impactante ?

 

1.Concevoir un seul document

Il est préférable de rédiger un document unique qui comporte l’ensemble des contestations ou différends à l’origine des demandes plutôt que de renvoyer à des courriers précédents (ou Demandes de Rémunération Complémentaires) reproduits en annexe.

 

2.Rédiger pour l’ensemble des utilisateurs

La rédaction d’un mémoire en réclamation est un exercice difficile parce que ce document va être analysé par de nombreuses personnes qui n’ont pas la même logique et qui n’y recherchent pas les mêmes informations. Prenons l’exemple d’une réclamation en matière de marché public de travaux : cette dernière sera analysée par le maître d’œuvre, par les services juridiques du maître d’ouvrage et le cas échéant son avocat, par les services techniques du maître d’ouvrage et par les décideurs, notamment des élus. En cas de désaccord entre les parties, ce sera au tour du magistrat d’en prendre connaissance. Ce même document va donc être utilisé par des techniciens, des financiers et des juristes. Toutes ces personnes recherchent la même chose. Elles veulent :

  • Trouver l’information recherchée le plus rapidement possible ;
  • La lire tout aussi rapidement ;
  • Et comprendre facilement l’information.

 

3.  Rédiger une synthèse autosuffisante

Cette synthèse est souvent présente mais peu compréhensible pour des personnes qui ne prendraient pas connaissance du détail de la réclamation. Or, les décideurs doivent pouvoir disposer d’une synthèse claire et efficace pour se faire une première idée de la réclamation.

 

4. Structurer selon la logique des utilisateurs

Les réclamations sont souvent présentées selon une structure qui n’est pas efficace pour les utilisateurs. Elles comportent souvent une première partie théorique qui rappelle les pièces contractuelles, les prévisions du contrat, pour ensuite détailler les difficultés rencontrées en cours de travaux, les fondements juridiques des demandes et la dernière partie traite du chiffrage.

Cette structure contraint les utilisateurs à naviguer dans le mémoire en réclamation pour recouper les informations. De plus, les sommes demandées sont présentées par grands postes de préjudices (main d’œuvre) et ne sont pas ventilées par chef de contestation. Or, les maîtres d’ouvrage, leurs conseils et le cas échéant, le juge, ont besoin de rattacher chaque fait générateur à un montant.

Une structure efficace décrit pour chaque chef de contestation (ex : remise tardive des emprises) :
– un fait générateur : une remise tardive des emprises (le contrat vs le déroulement du chantier) ;
– un préjudice et donc un chiffrage des conséquences de ce fait générateur ;
– un lien de causalité entre le fait générateur et le préjudice.

La structure d’un mémoire en réclamation efficace serait donc (i) une synthèse, (ii) puis un développement détaillé avec une introduction qui rappelle les grandes lignes du marché et les éléments de fait. Enfin, une ventilation des informations par chef de contestation.

 

5. Rédiger en langage clair

 

Cette réclamation doit comporter de nombreuses informations techniques, financières et juridiques qui doivent être comprises par des non spécialistes. Par exemple, l’avocat du maître d’ouvrage qui analyse une réclamation doit être en mesure de comprendre les grandes lignes des difficultés techniques pour appliquer un raisonnement juridique et conseiller au mieux son client. C’est naturellement la même problématique pour le magistrat. Les techniques de langage clair seront donc utiles à la fois pour les aspects techniques, les aspects financiers mais également pour les aspects juridiques.

 

6. Visualiser les éléments clés

 

La visualisation de l’information se prête bien à l’exercice du mémoire en réclamation. Par exemple, une frise chronologique efficace permet de décrire le calendrier initialement prévu et le calendrier réel pour mettre en exergue les conséquences des différents évènements sur le déroulement du chantier.

De plus, les tableaux seront d’une grande efficacité pour synthétiser le chiffrage des demandes.

Dans certains cas, une vidéo peut être utile pour décrire les aspects techniques.

 

7. Justifier chaque somme demandée

Parfois absente, régulièrement insuffisante, la justification des sommes demandées est essentielle. Trop de négociations échouent faute de justification.

 

8. Doser ses demandes

Le chiffrage doit être raisonnable et crédible. Trop souvent, les entreprises présentent une réclamation beaucoup plus élevée que la somme réellement due pour se laisser une confortable marge de manœuvre dans le cadre de la négociation. Ce comportement entraîne régulièrement un rejet irrémédiable de la part du maître d’ouvrage.

 

9. Organiser ses annexes

La structure des annexes suit celle du corps de la réclamation afin de permettre aux lecteurs de se repérer facilement et de trouver facilement les informations recherchées, par chef de contestation.

Le Legal Design permet de repenser ses mémoires en réclamation afin de les rendre plus efficaces. La clé est de se concentrer sur les utilisateurs de ces réclamations afin de leur permettre de trouver rapidement l’information, de la lire tout aussi rapidement et de la comprendre, même si cette information est technique. Plusieurs techniques peuvent être mises en œuvre dont la restructuration de l’information, la rédaction en langage juridique clair et la visualisation de l’information.

 

infographie lapisardi avocats – décret 28 décembre 2022

Décret n° 2022-1683 du 28 décembre 2022 portant diverses modifications du code de la commande publique

arrêté du 29 décembre 2022 modifiant les cahier des clauses administratives générales des marchés publics 

Nous l’attendions après les annonces du ministre de l’Economie il y a quelques semaines. Le décret du 28 décembre 2022 modifie le code de la commande publique avec 6 objectifs :

1.    Pérenniser pour les marchés publics de travaux < 100.000 € HT la dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence jusqu’au 31/12/2024 ;

2.    Augmenter le montant minimum de l’avance pour les PME dans les marchés de l’Etat (20 à 30 %) ;

3.    Clarifier le CCP sur la rémunération du maître d’œuvre, sur les modalités de remboursement de l’avance  ;

4.    Réduire le délai des ordres de service tardifs dans le CCAG travaux

4.    Préciser les conditions de transmission de la copie de sauvegarde

5.    Prévoir les modalités de mises en œuvre des marchés réservés pour les prestations réalisées dans des établissements pénitentiaires.

Ces modifications entrent en vigueur pour toutes les consultations lancées à compter du 1er janvier 2023.

 

I.              Marchés publics de travaux < 100.000 € HT : prolongation de la dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence jusqu’au 31 décembre 2024

Comme l’avait annoncé le ministre de l’Économie, la mesure temporaire issue de l’article 142 de la loi 2020-1525 du 7 décembre 2020 de simplification et d’accélération de l’action publique, valable jusqu’au 31 décembre 2022 est donc prolongée.

L’article 6 du décret prévoit ainsi cette dérogation, le cas particulier des petits lots et les rappels liés aux marchés conclus sans publicité ni mise en concurrence préalables :

« Jusqu’au 31 décembre 2024 inclus, les acheteurs peuvent conclure un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence préalables pour répondre à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes.

Ces dispositions sont également applicables aux lots qui portent sur des travaux dont le montant est inférieur à 100 000 euros hors taxes, à la condition que le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

Les acheteurs veillent à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin. »

II.             Les avances 

 

Pour les marchés de l’Etat le taux de l’avance minimal pour les PME passe de 20 à 30 % (article R2191-7 du CCP et R2391-4 pour les marchés de défense et de sécurité). Tous les CCAG sont modifiés en conséquence.

Les conditions de remboursement de l’avance sont clarifiées :

Le texte en vigueur

« Le remboursement de l’avance s’impute sur les sommes dues au titulaire, selon un rythme et des modalités fixées par les clauses du marché par précompte sur les sommes dues à titre d’acomptes, de règlement partiel définitif ou de solde.

Dans le silence du marché, ce remboursement s’impute :

1° Pour les avances inférieures ou égales à 30 % du montant toutes taxes comprises du marché, sur les sommes dues au titulaire quand le montant des prestations exécutées atteint 65 % du montant toutes taxes comprises du marché ;

2° Pour les avances supérieures à 30 % du montant toutes taxes comprises du marché, sur les sommes dues au titulaire dès la première demande de paiement » (R. 2191-11 du CCP)

Les modifications apportées par le décret

Le second alinéa de l’article R.2191-11 est remplacé par le texte suivant :

« Dans le silence du marché, le remboursement de l’avance est échelonné en tenant compte du montant de l’avance accordée et des sommes restant dues au titulaire. Ce remboursement s’impute par précompte sur les sommes dues au titulaire et débute :

1° Pour les avances inférieures ou égales à 30 % du montant toutes taxes comprises du marché, quand le montant des prestations exécutées atteint 65 % du montant toutes taxes comprises du marché ;

2° Pour les avances supérieures à 30 % du montant toutes taxes comprises du marché à la première demande de paiement.

Et l’article R.2193-21 qui concerne les avances en cas de sous-traitante est modifié de la même façon :

« Si le titulaire du marché qui a perçu l’avance sous-traite une part du marché en cours d’exécution, il rembourse l’avance correspondant au montant des prestations sous-traitées et donnant lieu à paiement direct à l’acheteur, même dans le cas où le sous-traitant ne souhaite pas bénéficier de l’avance.

Le remboursement par le titulaire s’impute sur les sommes qui lui sont dues par l’acheteur dès et débute à compter de la notification de l’acte spécial.

 

III.           Précision sur les conditions de dépôt des copies de sauvegarde (article R.2132-11 CCP)

 

 

IV.           Précision sur les conditions de dépôt des copies de sauvegarde (article R.2132-11 CCP)

Pour mémoire, le code prévoit que les candidats et soumissionnaires qui transmettent leurs documents par voie électronique peuvent également adresser à l’acheteur une copie de sauvegarde de ces documents, sur support papier ou sur support physique électronique (article R.2132-11 CCP).

Le décret précise que « cette copie ne peut être prise en considération que si elle est parvenue à l’acheteur dans le délai prescrit pour le dépôt, selon le cas, des candidatures ou des offres. ».

Quant au support de cette copie de sauvegarde, elle n’est plus précisée dans le code de la commande publique. La DAJ de Bercy indique que cette rédaction permet d’adresser une copie de sauvegarde par voie dématérialisée (par exemple sur une plateforme en ligne). Un arrêté viendra préciser les exigences techniques et de sécurité.

V.           La rémunération du maître d’œuvre en cas de dépassement du seuil de tolérance est clarifiée

Le décret clarifie les textes et limite les cas dans lesquels le maitre d’ouvrage peut, en cas de dépassement du seuil de tolérance :

(1) demander au maitre d’œuvre de reprendre ses études sans rémunération supplémentaire (coût prévisionnel des travaux) ;

(2) réduire sa rémunération (coût des travaux).

Cette modification ne change pas le droit positif : Il s’agit d’une clarification des textes conforme à la jurisprudence.

 

Le cas de l’adaptation des études en cas de dépassement du seuil de tolérance (coût prévisionnel des travaux)

Pour mémoire l’article R.2432-3 du CCP précise que

« Lorsque la mission confiée au maître d’œuvre comporte l’assistance au maître d’ouvrage pour la passation des marchés publics de travaux, le marché public de maîtrise d’œuvre prévoit l’engagement de son titulaire de respecter le coût prévisionnel des travaux arrêté au plus tard avant le lancement de la procédure de passation des marchés publics de travaux.

Le respect de cet engagement est contrôlé à l’issue de la consultation des opérateurs économiques chargés des travaux.

En cas de dépassement du seuil de tolérance, le maître d’ouvrage peut demander au maître d’œuvre d’adapter ses études, sans rémunération supplémentaire ».

Le décret modifie le dernier alinéa (partie surlignée) :

« En cas de dépassement du seuil de tolérance, ne résultant pas de circonstances que le maître d’œuvre ne pouvait prévoir, le maître d’ouvrage peut lui demander d’adapter ses études, sans rémunération supplémentaire ».

En clair,

Si le seuil de tolérance est dépassé, le maître d’ouvrage peut, en principe, demander au maître d’œuvre d’adapter ses études sans rémunération supplémentaire. Ce n’est toutefois pas le cas si le maître d’œuvre peut prouver que ce dépassement est lié à des circonstances qu’il ne pouvait pas prévoir.

 

La réduction de la rémunération du maître d’œuvre en cas de dépassement du seuil de tolérance (coût des travaux)

Le texte en vigueur

Pour mémoire l’article R.2432-4 du CCP précise que

« Lorsque la mission confiée au maître d’œuvre comporte, outre l’assistance au maître d’ouvrage pour la passation des marchés publics de travaux, la direction de l’exécution des marchés publics de travaux et l’assistance au maître d’ouvrage lors des opérations de réception, le marché public de maîtrise d’œuvre prévoit un engagement de son titulaire de respecter le coût, assorti d’un nouveau seuil de tolérance, qui résulte des marchés publics de travaux passés par le maître d’ouvrage.

Le respect de cet engagement est contrôlé après exécution complète des travaux nécessaires à la réalisation de l’ouvrage en tenant compte du coût total définitif des travaux résultant des décomptes finaux et factures des opérateurs économiques chargés des travaux.

Pour contrôler le respect de l’engagement du maître d’œuvre, le marché public de maîtrise d’œuvre prévoit les modalités de prise en compte des variations des conditions économiques.

En cas de dépassement excédant le seuil de tolérance fixé par le marché public de maîtrise d’œuvre, la rémunération du maître d’œuvre est réduite. Le marché public de maîtrise d’œuvre détermine les modalités de calcul de cette réduction qui ne peut excéder 15 % de la rémunération du maître d’œuvre correspondant aux éléments de missions postérieurs à l’attribution des marchés publics de travaux. »

La modification apportée par le décret du 28 décembre 2022

Le décret modifie le dernier alinéa (partie surlignée) :

En cas de dépassement du seuil de tolérance résultant d’un manquement du maître d’œuvre dans ses missions de direction de l’exécution des marchés publics de travaux et d’assistance au maître d’ouvrage lors des opérations de réception, la rémunération du maître d’œuvre est réduite. Le marché public de maîtrise d’œuvre détermine les modalités de calcul de cette réduction qui ne peut excéder 15 % de la rémunération du maître d’œuvre correspondant aux éléments de missions postérieurs à l’attribution des marchés publics de travaux.

En clair,

Si le seuil de tolérance est dépassé après l’exécution complète des travaux, le maître d’ouvrage ne peut réduire la rémunération du maitre d’œuvre que si ce dépassement résulte d’un manquement de ce dernier à ses missions de direction de l’exécution des marchés publics de travaux et d’assistance au maître d’ouvrage lors des opérations de réception.

Donc le maître d’ouvrage ne peut pas réduire la rémunération du maître d’œuvre si le dépassement du seuil de tolérance est lié à une circonstance qui n’est pas imputable à ce dernier, par exemple, à des circonstances imprévisibles.

VI.             Précision des conditions de réservation des marchés et des concessions pour les entreprises qui réalisent des prestations dans des établissements pénitentiaires (article 19 de la l’ordonnance n° 2022-1336 du 19 octobre 2022)

Le décret précise les conditions d’application des articles L. 2113-13-1 et L. 3113-2-1 du code de la commande publique qui prévoient un nouveau cas de réservation de marchés publics et de contrats de concession au bénéfice d’opérateurs économiques qui exécutent des prestations en établissement pénitentiaire.

Le décret fixe à 50 % la proportion minimale de personnes détenues qui doivent être employées dans le cadre de ce nouveau dispositif (R.2113-7 CCP).

mots clés : marchés publics – concession – marchés publics de travaux inférieurs à 100.000 € HT – rémunération du maitre d’œuvre – avances – marchés réservés – copie de sauvegarde

Ces achats publics innovants font leur entrée dans le code de la commande Publique et deviennent ainsi pérennes

Le décret du 13 décembre 2021  crée un nouvel article : R.2122-9-1 du CCP et met un terme à l’expérimentation prévue par le décret du 24 décembre 2018.

Pour mémoire, voici le mécanisme des achats innovants :

Il est possible de passer un marché public sans publicité ni mise en concurrence préalables pour des achats innovants (travaux, fournitures ou services innovants) et pour un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 €HT.

💡 Qu’entend-on par achats innovants ?

La réponse est donnée à l’article L.2172-3 du CCP sur le partenariat d’innovation : il s’agit de travaux, fournitures ou services nouveaux ou sensiblement améliorés. Le caractère innovant peut consister dans la mise en œuvre :
-de nouveaux procédés de production ou de construction,
-d’une nouvelle méthode de commercialisation
-ou d’une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques, l’organisation du lieu de travail ou les relations extérieures de l’entreprise.

🧩L’achat innovant intègre également le mécanisme des petits lots.

 

Quand le besoin est supérieur à 100.000 €HT et qu’il est scindé en lots dont certains correspondent à des achats innovants, l’acheteur peut passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables pour ces petits lots, si 2 conditions sont réunies :

– Le montant de chaque lot lié à l’achat innovant est inférieur à 80.000 €HT pour les fournitures ou services innovants ou 100.000 €HT pour les travaux innovants ;

– Et le montant du lot ou le montant cumulé de ces petits lots ne dépasse pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

Le nouvel article R.2122-9-1 du CCP rappelle ensuite que « Lorsqu’il fait usage de cette faculté, l’acheteur veille à choisir une offre pertinente, à faire une bonne utilisation des deniers publics et à ne pas contracter systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin. »

L’obligation de déclaration auprès de l’Observatoire économique de la commande publique, autrefois prévue par le décret du 24 décembre 2018, n’est pas reprise dans le CCP.

🧭 Décret n° 2021-1634 du 13 décembre 2021 relatif aux achats innovants et portant diverses autres dispositions en matière de commande publique, publié aujourd’hui au JO.

⏰ cette modification du CCP entre en vigueur demain le 16/12/21.

 

 

 

marchés publics innovants

Article publié dans Dalloz Actualité le 8 septembre 2021 

 

Le décret n° 2021-1111 du 23 août 2021[1] tire les conséquences de la décision de la CJUE du 17 juin 2021 Simonsel & Well A/S aff C 23/20 sur les accords-cadres et modifie certaines règles concernant les marchés de défense ou de sécurité.

Les accords-cadres devront toujours comporter un maximum en montant ou en quantité

La modification du code de la commande publique ne s’est pas fait attendre.

En juin dernier, la Cour Européenne a en effet considéré que l’acheteur public était tenu de prévoir un montant ou une quantité maximum et qu’une fois cette limite atteinte, l’accord-cadre aura épuisé ses effets.

Le décret modifie donc les articles R.2121-8 et R .2162-4 du Code de la commande publique. L’acheteur public doit fixer un maximum en valeur ou en quantité pour tous les accords-cadres (à bons de commande ou à marchés subséquents). En revanche, il est toujours possible de conclure des accords-cadres sans minimum.

 

Mais l’entrée en vigueur, repoussée au 1er janvier 2022, laisse perplexe

En effet, cette règle s’appliquera aux accords-cadres pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 1er janvier 2022.

Ce report est d’autant moins compréhensible que dans ses commentaires sur cet arrêt, la DAJ du Ministère de l’économie recommandait aux acheteurs d’appliquer d’ores et déjà cette règle[2].

Le juge n’a d’ailleurs pas attendu pour annuler des procédures de passation pour ce motif. Nous recensons à ce jour deux décisions par lesquelles le juge du référé précontractuel annule la procédure de passation en raison de l’absence de valeur ou de quantité maximum [3]. Le juge des référés s’appuie sur l’arrêt de la CJUE et fait fi de l’entrée en vigueur repoussée du décret du 23 août 2021. Selon lui, cette jurisprudence est immédiatement applicable car la CJUE n’a pas limité dans le temps la portée de sa décision.

Dans ces deux décisions, le juge a également considéré que le requérant était lésé par ce manquements aux règles de publicité et de mise en concurrence.

 

Pourtant, l’existence d’une lésion n’allait pas de soi. Dans son arrêt de juin dernier la CJUE avait considéré que ce manquement était « suffisamment perceptible pour pouvoir être décelé par un opérateur économique qui entendait soumissionner et qui devait, de ce fait, être considéré comme étant averti ».  Mais le juges des référé s’appuie sur les raisons données par la CJUE : ce maximum revêt « une importance considérable pour un soumissionnaire »[4] car c’est sur cette base que ce dernier sera en mesure d’apprécier sa capacité à exécuter les obligations découlant de cet accord-cadre. Le juge des référés national en conclut que faute d’information sur ce maximum le requérant n’a pas pu une présenter une offre adaptée. Et l’argument selon lequel le requérant était l’attributaire sortant et disposait ainsi de suffisamment d’informations, est systématiquement rejeté.

Il faut donc que les acheteurs publics appliquent cette règle dès à présent.

Une mise en pratique qui pose des difficultés car il s’agit d’un changement culturel pour les acheteurs publics

Pour bon nombre de consultations, cette obligation va poser des difficultés. Prévoir une estimation du montant ou des quantités fait déjà souvent l’objet d’âpres discussions en interne entre acheteurs publics et prescripteurs. On peut donc imaginer que fixer une valeur ou une quantité maximale sera parfois une gageure. Car cette règle remet en cause une partie de la souplesse des accords-cadres. Il n’est désormais plus possible de prévoir des achats illimités avec un ou des prestataires pendant une période déterminée. Le maximum est un couperet ; une fois atteint le marché cesse.

Certains seraient alors tentés de « gonfler » ce maximum pour s’assurer une marge de manœuvre durant l’exécution du marché et ainsi faire face à une hausse des besoins. C’est d’ailleurs ce que recommandait la DAJ de Bercy dans sa note sur l’arrêt de la CJUE[5].

Mais c’est une fausse bonne idée.  La CJUE justifie l’obligation de fixer un maximum par le respect des grands principes de la commande publique. En effet, cette information a pour objectif de permettre aux candidats de comprendre la portée des obligations contractuelles mises à leur charge et corrélativement, à l’acheteur public de vérifier que les offres correspondent à ses exigences. Autrement dit, le maximum permet d’apprécier la capacité de l’entreprise à exécuter les obligations découlant du marché. Aussi, en « gonflant » le maximum, les acheteurs publics risquent de dissuader les plus petites entreprises de se présenter ou même d’écarter ou de désavantager ces mêmes entreprises lors de l’analyse des candidatures ou des offres.

Autre effet néfaste de la surestimation du maximum : elle va fausser un certain nombre d’informations et notamment les chiffres de l’observatoire économique de la commande publique (OECP).

 

La passation des marchés de défense ou de sécurité (MDS) est allégée et simplifiée

Les MDS sont des marchés conclus par l’Etat et ses établissements publics qui ont l’un des objets listés à l’article L1113-1 du code de la commande publique. Il s’agit par exemple de la fourniture d’équipements qui sont destinés à être utilisés comme des armes à des fins militaires. Comme ces MDS sont soumis à un régime dérogatoire pour leur passation et leur exécution, le juge veille à leur périmètre. Ainsi, le marché de fournitures de pistolets semi-automatiques lancé par le Ministère de la transition écologique et solidaire pour ses agents de contrôle et de surveillance n’est pas un MDS[6].

Et le décret du 23 août 2021 rend le régime de ces marchés un peu plus dérogatoire aux règles des autres marchés.

En effet, le seuil de publicité et de mise en concurrence passe de 40.000 euros HT à 100.000 euros HT.

L’acheteur pourra également passer un marché sans publicité ni mise en concurrence pour les lots inférieurs à 80.000 €HT si le montant cumulé de ces lots n’excède pas 20 % de la valeur estimée totale des lots[7].

Le décret prévoit également un nouveau cas de marché sans publicité ni mise en concurrence : il s’agit des marchés de fournitures ou de services scientifiques ou techniques. Deux conditions doivent être remplies :

  • Le montant estimé du marché doit être inférieur au seuil de procédure formalisée,
  • et il doit être nécessaire à l’exécution de tâches scientifiques ou techniques sans objectif de rentabilité et spécialisé dans le domaine de la recherche du développement, de l’étude ou de l’expérimentation. Il ne peut pas s’agir de prestations de fonctionnement courant du service[8].

 

Les règles concernant la computation des achats payés par carte achat sont assouplies : le code autorise désormais une vérification a posteriori et par trimestre de la valeur des marchés payés par carte achat[9].

Les règles de publicité pour les procédures adaptées sont également allégées. Désormais, la publication au Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) n’est plus obligatoire. L’acheteur public choisira librement les modalités de publicités adaptées en fonction des caractéristiques du marché[10].

Dans le but de favoriser l’accès des petites et moyennes entreprises aux MDS, le décret supprime l’obligation de constituer des garanties financières en contrepartie du versement de certaines sommes. Il prévoit également plusieurs mesures d’ordre financier pour le règlement partiel définitif[11].

Ce décret clarifie également la rédaction de certaines règles, notamment celles concernant la fixation des prix définitifs[12].

A l’exception des règles relatives aux maximums pour les accords-cadres (voir ci-dessus), les règles sur ces marchés de défense ou de sécurité s’appliquent aux marchés pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 26 août 2021.

Sophie Lapisardi, avocat associé, spécialiste en droit public

 

 

[1] modifiant les dispositions du code de la commande publique relatives aux accords cadres et aux marchés publics de défense ou de sécurité

[2] https://www.economie.gouv.fr/daj/consequences-sur-les-accords-cadres-de-larret-de-la-cjue-simonsen-weel

[3] TA bordeaux, ord, 23 août 2021, Sté Coved n° 2103959 et TA Lille, ord, 27 août 2021 SELARL Centaure Avocats, n° 2106335

[4] CJUE du 17 juin 2021 Simonsel & Well A/S aff C 23/20

[5] https://www.economie.gouv.fr/daj/consequences-sur-les-accords-cadres-de-larret-de-la-cjue-simonsen-weel

[6] Conseil d’Etat 18 décembre 2019, Min. de la Transition écologique et solidaire c/ Sté Sunrock n0 431696

[7] Article 2322-14 modifié (article 6 du décret)

[8] Nouvel article R 2322-15 (article 7 du décret)

[9] Nouvel article R.2321-7 créé par l’article 5

[10] Article R.2331-5 modifié (article 9 du décret)

[11] Nouveaux articles R.2391-20-1 et R.2391-20-2 (article 22 du décret)

[12] Article 3

 

 

Loi Asap et commande public